ON STRIKE
Bio Les Thugs / "Strike" (par DavDuf)
Un soir de 1993, à la Roche-sur-Yon, les Thugs jouèrent comme à chaque
fois. Un peu comme ces gardiens de but - angoissés, dit-on - au moment des
penalties, qui n'ont d'autres alternatives que :
Sortir le grand jeu
Ou se faire siffler.
Ce soir-là, comme chaque soir, les Thugs - eux-mêmes gardiens d'un
certain feu sacré, celui du punk rock - étaient en finale. Contre eux-mêmes,
et leur noirceur. Pour eux-mêmes, et le besoin de chasser l'humeur (mauvaise)
de leurs consciences.
Devant eux - comme à Los Angeles, Londres, ou Florence - les afficionados
de la Roche-Sur-Yon s'agitaient. C'était du hourra rock 'n' roll. Les Thugs
jouaient vite, et fort. Le feu ne fut pas éteint.
Quelques minutes auparavant, dans la conversation, quelqu'un du groupe
avait sorti ça, comme une confidence, une évidence: "Dès nos débuts [en
1983] nous avions des idées précises sur ce que nous voulions faire. On
savait qu'on suivrait nos buts sans écouter ni les critiques, ni les
louanges. Nous pourrions chercher à changer de style à chaque album,
explorer d'autres musiques mais nous préfêrons ceux qui s'obstinent à
développer leurs idées-forces. On ne demande pas à un peintre de changer
son coup de pinceau tous les deux ans."
Deux ans plus loin, le propos brille encore de sa belle lucidité. Le
sixième album des Thugs, "Strike", sonne thugs. On ne change pas une équipe
qui gagne, diraient les commentateurs sportifs.
Ainsi donc: malgré plus de six cents concerts, plusieurs tournées
européennes et nord-américaines, des propositions à faire tourner les têtes
et les comptes en banque de beaucoup, les Thugs thugsent toujours, plus
opiniatres que jamais, sans baisser les bras - ni le reste. Et sans
lassitude. Comme s'il y avait, chez eux, une obligation à être. Un truc qui
touche à l'essentiel, à la nécessité. A l'absolu, qui sait? A l'image de
quelques autres, reconnus après beaucoup d'ardeur et de tant labeur (Sonic
Youth, Neil Young, ou Steve Albini - ici producteur, précisément - etc).
Et dans un monde où ne vaut que ce qui se zappe, n'existe que se qui est
calibré, marketé, emballé c'est pesé, la régularité et la longévité des
Thugs apparaissent tel un signe salvateur. Un signe qui dirait que, non,
tout n'est pas perdu. Qu'on peut rester fidèles à ses amis (Les Thugs
furent, sont et resteront angevins). Qu'on peut demeurer indépendants (leur
nouvel album est distribué en France par Roadrunner et dans le reste du
merveilleux monde par Sub-Pop). Que les petits studios (en l'occurence,
celui de l'ami Ian Burgess, Black Box) valent mieux que bien des grandes
salles capitonnées.
Ou encore, enfin: que la lutte, hum, continue.
Il faut savoir commencer une grève.
Le nouvel album des Thugs s'intitule "Strike".
Un camarade gréviste
Post scriptum:
Dans la conversation d'avant concert, un des Thugs ajouta: "Franchement,
que nous pourrions faire de mieux [que jouer notre musique] ? Quand nous
avons demarré, jouer à Nantes était notre projet ultime. On s'éclatait
devant trente personnes. C'est presque plus agréable maintenant qu'à nos
débuts"
Copyright :
DavDuf (merci man !) dont le site "la Rafale" valait le détour !
Les paroles n'étant qu'à moitié sur l'album ne sont pas recopiées !!
Les Thugs (Libération 02/04/96) :
Un morceau, on le met généralement en place très rapidement, mais les textes posent effectivement problème.
A la base, on reste des musiciens et écrire ne se fait pas sans difficultés; excepté sur nos premiers 45 tours,
on n'a jamais fait de remplissage, ce qu'on raconte se tient mais il y a toujours le sentiment de se répéter,
de ne pas se sentir doué pour broder à partir du premier événement venu.
(...)
Par nature, on n'est pas des corbeaux, et dès qu'on peut se fendre la gueule, on n'hésite pas. Mais le monde
est noir et, à travers la musique, s'exprime la partie de nous qui se pose des questions, qui est directement
touchée par ce qui se passe. Or, excepté le dernier mouvement de grèves, il n'y a guère de raison d'être optimistes,
tout concourt à nous persuader que les choses vont de plus en plus mal. Pourtant, on a la chance de vivre dans
un pays riche, européen.
@Allez les filles !
@Summer
@Strike
I don't want to get up, I close my eyes
The world is ugly, I'm gonna dream it nice
Today I'm no winner, I make no plans
I don't wanna fight, don't even wanna try
Outside the air is cold, I am on strike.
Christophe (F440 #16) :
"En toute humilité, c'est l'idée qu'on retrouve dans la chanson de
Souchon, "un beau matin, fatigué, j'irais m'asseoir sur le trottoir d'à
côté". C'est pas une grève responsable, organisée par des syndicats
avec des objectifs précis. C'est un ras-le-bol, une façon de dire
"si c'est ça, ma journée, je préfère pas me lever". Même si rester dans
son lit n'est pas forcément la meilleure manière de changer les choses.
Ce qui est certain, c'est qu'on n'est pas un groupe engagé. Et je me méfie
des groupes qui disent l'être, parce qu'ils arrivent rapidement à des
contradictions. Les seuls qui vont réellement au bout de leur truc, c'est Fugazi"
@Poison Head
@Loving Son
@Bella Canzon
@Assez !
@Waiting
@Stories
@New Day
@The Letter
@So Heavy
Copyright :
Les Thugs II - Eric, Pierre-Yves, Christophe, Thierry
F440 #16 - Yann Zitouni
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Bio Les Thugs / "Hors d'oeuvres" (par Jonathan Poneman)
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Je me souviens qu'en 1988, Bruce Pavitt et moi-même avions fait le
voyage à Berlin avec Mudhoney, qui étaient au programme du festival
musical subventionné par l'Etat les Journées de l'Indépendance de Berlin.
En tant que représentant non-officiel du Rock Underground Americain
insurgé (étrange non ?), je me contentais de noter que la plupart des
groupes Européens qui jouaient à cette bouffonnerie étaient mauvais.
Me demandant juste jusqu'à quel point cela pouvait être horrible,
je décidais d'aller voir pour vérifier cela un groupe de rock Français.
Peut-être qu'ils joueraient quelques reprises de Mink DeVille.
Ce groupe était Les Thugs et ils m'ont abassourdi. Après avoir mendié
de manière peu convenable, ils ont accepté d'enregistrer un single faisant
partie de notre Singles Club qui débutait. Ainsi ont commencé nos attaches
longues de presque une décennie avec le groupe. Il y a peu de choses auquel
je tienne autant que d'être le label des Thugs. A l'exception d'IABF, qui est
sorti sur Alternative Tentacles (ils étaient fans, nous étions fauchés), Sub
Pop a sorti avec fierté chaque album des Thugs (Jonathan Poneman ne compte
pas "Radical Hystery") en Amérique du Nord. Ils sont maintenant le "plus vieux
groupe de Sub Pop". Je ne peux imaginer de meilleur groupe être le reflet standart
de notre label.
Ce qui nous amène à cette collection spéciale de "hits".
Les Thugs sont l'un des plus grands groupes de rock dans le monde. Ils fusionnent
l'hypnotique avec l'explosif comme aucun autre groupe auquel je puisse penser.
Avec chaque album ils ont simultanément affiné et étendu leur oeuvre (en français
dans le texte). Bien qu'ils chantent dans une langue étrangère, leur niveau
d'émotion, de sophistication et d'humour ne baisse jamais et est toujours une
source d'inspiration. Ecoutez ceci. Tout est dedans.
Jonathan Poneman est le co-fondateur de Sub Pop
Merci à Dave Rosencrans pour cette bio.
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Traduit par Stéphane Dufour
(la version originale de la bio en anglais se trouve sur la page)