POGO (Pour des Oreilles Grandes Ouvertes) Hors Série
#1 Interview : les THUGS
A l'occasion de la sortie du nouvel album des
THUGS, Roadrunner m'a contacté pour savoir si j'étais
intéréssé pour réaliser une interview.
Etant fan du groupe, je saute sur l'occasion. L'interview qui
a été réalisé le 9 janvier 1996, a
été diffusée sur Radio Triangle, dans l'émission
Zone Libre où j'anime, et sort par écrit par l'intermédiaire
d'un hors série POGO. Je remercie donc Roadrunner (tout
particulièrement Thibault) ainsi que Pierre-Yves (bassiste)
pour m'avoir répondu aussi gentiment.
Lib : "Strike" sort le 15 janvier en france, pourquoi avoir choisi ce titre pour l'album ?
PY : Il a été choisi il y a longtemps, au mois de juin donc il n'y a aucun rapport avec ce qui c'est passé après.
Lib : Rien à voir avec les 3 dernières semaines ? (cf grèves)
PY : Aucun rapport si ce n'est la relation entre le titre et ce qui c'est passé...il y a un morceau de l'album qui s'appelait comme ça et qui en fait parle un peu du fait du travailleur qui se retrouve en grève et qui se rend compte qu'il est mieux en grève qu'au travail, voilà.
Lib :Vous avez resigné sur Roadrunner,vous êtes donc satisfait de ce label?
PY : Tout à fait, c'est des gens compétents avec qui on s'entend bien et qui aiment le groupe et donc ça facilite les choses.
Lib : Justement, que vous a apporté Roadrunner par rapport à vos précédents labels ? Point de vue ventes et distribution ?
PY : En fait c'est une continuité, on a toujours essayé de travailler avec des gens avec qui on s'entendait bien et à ce moment là, ils étaient là et ça fait qu'au niveau de l'évolution c'est un peu pour consolider la vente des disques. A ce moment là, si tu vends plus de disques, t'es obliger de passer avec des gens plus importants.
Lib : Vous êtes distribué en france par Roadrunner et pour le reste du monde par Sub Pop...
PY : Ouais, il y a très longtemps, et on avait fait, le premier "IABF" sur... non, c'est "Electric Troubles" qui était sorti sur Sub Pop, après "IABF" sur Alternatives tentacles puis on était revenu sur Sub Pop après...
Lib : C'est Steve Albini qui a produit "Strike", pourquoi lui et pas Kurt Bloch comme pour le précédent ?
PY : Bah c'est un peu ce qui se passe pour tous les albums, on a tout le temps changé de producteur pour chaque album et on a la possibilité de travailler avec pleins de gens différents, donc on utilise cette possibilité au maximum et vu que c'est quelqu'un qu'on aimait bien, ainsi que le travail qu'il avait fait avec d'autres groupes, on a décidé de faire ça avec lui, on s'est dit pourquoi pas essayer avec lui ?
Lib : Et Christophe participe toujours à la production ?
PY : Ouais, bien sûr, surtout Christophe et nous un petit peu, mais pas trop.
Lib : C'est toujours une envie de contrôler un peu...
PY : Ouais toujours! C'est pour ne pas avoir de surprise.
Lib : "As happy as possible" était sortie en93, "Strike" en 96. Pourquoi avoir attendu si longtemps?
PY : En général, on met toujours un peu plus de 2 ans entre 2 albums, entre la sortie et la composition des morceaux. Et là, en plus, on a pris un peu un an où on n'a pas fait grand chose, pour se reposer, on n'avait pas trop envie, on n'était pas spécialement pressé. On n'avait pas de date butoir, on ne nous a pas dit: il faut enregistrer un album dans les 2 ans à venir. On était donc pas spécialement pressé par le temps.
Lib : Il n'y a aucune pression de Roadrunner !
PY :Aucune , c'est ça qui est bien !
Lib : C'est votre 6ème album. Pensez-vous qu'il apporte un plus par rapport aux précédents ?
PY : Non, non je ne pense pas. Je pense qu'on s'est toujours... On se libère peut-être un petit peu plus, peut-être de plus en plus en essayant des choses un peu différentes et qu'on faisait pas au début et à part ça non... non, non.
Lib :Moi je le trouve...je ne l'ai écouté qu'une fois (j'avais reçu la copie promo le jour même de l'interview) je le trouve un petit peu plus violent, plus violent que les précédents, comme "As happy"...
PY : C'est peut-être parce que tu ne l'as écouté qu'une fois ! (Rires des 2 cotés!). Parce que depuis le début, c'est pas ce que l'on nous dit, depuis le début on nous dit qu'il y a pas mal de morceaux lents. Mais moi, je suis un peu d'accord avec toi, je trouve que ça bastonne pas mal dans l'ensemble et puis on va continuer à bastonner pas mal. C'est un petit peu ce que l'on préfère !
Lib : De toute façon, les Thugs se caractérise par une rage contrôlée...
PY : Ouais, ouais, tout à fait.
Lib : En êtes vous content, justement de cet album, après l'avoir réécouté ?
PY : Ahh, on a toujours des... Je crois que je n'ai jamais vu les Thugs totalement satisfaits après la sortie d'un album...Evidemment, on trouve ça vachement bien, mais il y a toujours des petits trucs que tu te dis après l'enregistrement, quand on écoute le disque, tu dis ooohhh ça cela aurait pu être moins fort, sur ce morceau là...Mais bon, en général, on ne sort jamais un truc sur lequel on est pas tous d'accord, si tu veux...et il faut toujours que cela nous plaise un max avant de le sortir.
Lib: Vous aviez des idées précises quand vous êtes allé en studio?
On arrive toujours en studio avec les morceaux prêts, il n'y a aucune improvisation.Peut-être que des fois on devrait improviser, je ne sais pas, mais on l'avait fait un peu sur "As happy" , tous les petits intermèdes qu'il y avait eu entre les morceaux, on les avait faits là-bas, on ne les avait pas préparés avant, mais là tout était prêt, voilà.
Lib : Justement, c'est peut-être aussi pour vous permettre de pouvoir les refaire en concert, parce que je crois qu'il y avait certains titres que vous n'arriviez pas à refaire...
PY: Oui très juste.
Lib : Justement au niveau d'"IABF", il y avait certaines chansons comme "Welcome to the club"...
PY : Ouais, ouais pareil sur "As happy", il y a un morceau, je ne sais plus comment il s'appelle...et puis aussi le dernier, enfin bon qu'on pouvait pas techniquement..., c'était très dur à faire sur scène, donc on avait décidé de ne pas les faire. On préfère autant faire des morceaux qu'on pourra rejouer sur scène. C'est la chose principale.
Lib : Qui a écrit les textes de cet album ?
PY: C'est Christophe.
Lib: Parce que je crois que pour le précédent, il y avait eu un petit peu plus de disparité.
PY : Oui , moi j'ai écrit un morceau qui s'appelle "Loving fun" et Eric, il a du écrire 1 ou 2 morceaux, "the letter", oui là pareil, j'ai chanté sur 1 morceau, on se disperse un petit peu plus, c'est vrai que c'est Christophe qui chante un petit peu plus de morceaux qu'Eric donc, c'est vrai qu'on essaye des trucs un petit peu différent.
Lib : En plus de 12 ans d'activités musicales vous n'avez jamais sortie d'album live...Il y a une raison particulière ?
PY : Si on sortait un live, je crois qu'il faudrait pas mal le remixer pour que...pour enlever les pains qu'on fait, des trucs comme ça, c'est surtout que ça nous interesse pas beaucoup. En fait voilà, et puis si les gens veulent voir du live, ils viennent nous voir en concert. J'ai jamais été très fan des lives.
Lib : J'ai remarqué qu'à chaque fois vous étiez sur Vynil solution, qu'est exactement Vynil solution, par rapport aux autres labels ?
PY : C'est fini, on est plus avec eux. C'était notre maison de disques principale, si tu veux, après tous les labels où on était c'était des licences. Ils revendaient le disque aux pays. On est plus avec Vynil solution depuis "As happy".
Lib : En feuilletant des magazines, je n'ai pas l'impression que vous tournez beaucoup, de quoi vivez vous ?
PY : (Rires) Oui depuis 2-3 ans, on a pas fait beaucoup de concerts. Là, on en refait.
Lib : De quoi vivez vous alors ?
PY : Euh... on a la chance de vivre de l'intermitence du spectacle. On a aussi la chance d'avoir des royalties, de la sacem, ce qui nous permet de vivre.
Lib : C'est dû aux ventes de disques ?
PY : Tu sais ce qu'est l'intermitence ? (Chacun son tour de poser des questions)
Lib : Non ?
PY: En fait c'est...Voilà nous on est payé pour les concerts que l'on fait et c'est les assédic qui te reversent de l'argent, c'est un statut pour les musiciens, mais bon il faut tourner pas mal, 45 concerts par an et après t'as le droit d'être indemnisé par les assédic et après rentrent aussi les droits télé, la sacem, les ventes de disques, les royalties et tout ça. (Merci pour les explications)
Lib : Ce qui vous permet d'avoir pas mal d'activités extérieures au groupe,
PY : Oui, oui énormément, le groupe, dans la semaine, il nous prend 2 heures par jour, quand on ne tourne pas, tu vois depuis 2 ans.
Lib : Parce qu' Eric s'occupe de Black & Noir, Christophe fait de la production, et les 2 autres, ils font quoi ?
PY: Bah moi je m'occupe pas mal du catalogue de VPC des Thugs, je m'occupe des T-shirts, de la conception, de la vente, et puis c'est tout voilà !
Lib: Justement je crois que c'est une sorte de fan club que tu fais ?
PY : Ouais, enfin, fan club j'aime pas trop ça...
Lib : Bon ben, disons VPC du matériel des Thugs, t'as une adresse que tu peux donner ?
PY: Bah c'est chez moi !
Lib : C'est à dire ? (Rires)
PY : Frenetic Dancing -7 rue du mail- 49100 Angers. Donc demande de catalogue et envois, ou alors on en distribue sur les lieux de concerts.
Lib : Justement point de vue CD, vous arrivez à contrôler les prix par rapport à Roadrunner ?
PY : On essaie un maximum, on essaie pour que ce ne soit pas trop trop cher, on a réussi à avoir un deal avec Roadrunner pour qu'il ne sorte pas trop cher dans les magasins.
Lib : Et il va encore sortir en vynil ?
PY : Oui, il sort en vynil.
Lib : Il est assez court par rapport à l'album précédent ?
Il y a 20-30 minutes en moins, il faisait 71 minutes je crois et celui là il doit faire 40 ... Ouais il y a pratiquement 30 minutes en moins, ouais c'est beaucoup.
Lib : Ca n'avait pas posé un petit problème avec Roadrunner, qui je crois avait dit : tiens c'est un peu bizarre de sortir un double album.
PY: Non c'est Sub pop que ça avait géné, il aurait préféré qu'il y ait un morceau de moins pour descendre en dessous des 60 minutes.
Lib: Pour l'édition vynil ?
PY : Euh oui, par exemple, oui, ça obligeait à sortir 2 disques. Mais non, non ça a été vite résolu, on voulait faire ça et on tenait à se que l'on respecte notre choix. Donc après discussion, qui n'a pas été longue, mais ça s'est fait comme ça.
Lib : Pareil, vous avez sorti pas mal de titres sur des compilations, pas mal sur de vieux vynils, dans différents pays. Pensez-vous un jour les rééditer en CD?
PY: ....
Lib : Je pense à de vieux morceaux comme "Night dance", "Femme fatale", "You say why", "Something's gonna wrong again", etc...
PY : Umh, umh, ouais ,ouais,....On n'y a jamais trop réfléchi, c'est pas con comme idée (Rires), pas bête, ...On n'y a jamais trop réfléchi.
Lib : Non parce qu'il y a des vieux trucs qui datent de 86, 88...
PY : Très juste, très juste...
Lib : Donc pas mal sont épuisés et je crois que le seul EP encore disponible est un splitt avec Uptown Bones.
PY : Oui, c'était sur Black & Noir qui l'avait sortie d'ailleurs. Ouais c'est vrai, il faut que j'en parle aux autres (Rires).
Lib : Je crois que vous n'aimez pas trop répondre aux interviews des magazines, c'est pas trop dur de faire 2 jours de promo ?
PY : Non, ça va, faut pas se plaindre parce que je crois qu'il y a des gens qui font des choses beaucoup moins intéressantes dans la vie et que nous, pour l'instant on a pas à se plaindre donc 2 jours... Mais bon, c'est vrai que dans un sens, on préfère les fanzines et les petites radios. Mais faut tout faire.
Lib : C'est par rapport aux débuts, lorsque vous avez commencé ?
PY : Ouais, c'est un peu ça, heureusement que les fanzines et les petites radios étaient là parce que je pense que les magazines que l'on voit rappliquer maintenant, les Thugs ça ne les intéressaient pas et voilà quoi ! donc ça fait un peu bizarre de les voir se ramener maintenant. Mais bon, qu'est-ce que tu veux...
Lib : C'est aussi dû au label, être sur Roadrunner à dû faciliter l'attrait des magazines !
PY : Bien sûr, c'est sûr, il y a une promo qui est faite sur la sortie de l'album, ils pensent qu'il y a quelque chose qui se passe, voilà et puis bon ça fait 10 ans qu'on existe donc ils prennent le groupe plus au sérieux qu'un groupe qui commence, tu vois ? , qui vient juste de commencer, même si je ne le justifie pas, je ne suis pas d'accord avec ça, mais bon je pense que c'est ce qu'ils croient.
Lib : Quels sont les groupes qui t'ont marqué ces derniers temps, dans le groupe en général ?
PY : Alors ... qu'est-ce que je pourrais dire ? Il y a tous les trucs genre Mudhoney, L7, Fugazi, tous ces trucs là. En groupe français, il y a Sloy, Skippies,Welcome to Julian ou des trucs comme ... j'écoute pas mal de trucs anciens, il y en a qu'aime bien les Pixies ou bien les Breeders, tu vois, c'est assez mélangé dans l'ensemble. Eric écoute pas mal de jazz, j'écoute un peu de musique classique, un peu de tout.
Lib : Ca influence un peu le groupe dans la musique ? Ou ça n'a rien à voir ?
PY : Peut-être, peut-être que le fait qu'on ait écouté de la musique classique, il y ait eu des violons sur "Strike" ou peut-être aussi parce qu'on a écouté de la musique arabe ou des trucs comme ça, ça a fait qu'on retrouve un peu... Bon des fois quand j'écoute un solo d'Eric, on retrouve des résonnances arabes. Tout ça, ça y fait peut-être ?
Lib : Le morceau avec de la harpe sur "As happy as possible", ça venait un peu de là aussi ?
PY : Oui oui, tout à fait, c'est plein de trucs, c'est normal, de toutes façons, à partir du moment où t'écoutes des trucs, t'as des idées qui te viennent obligatoirement.
Lib : Y a t'il des groupes avec qui vous vous sentez plus proches, parce que vous avez tourné avec eux ou parce que vous les voyez plus souvent ?
PY : oui bah il y a tous les groupes, comme je disais tout à l'heure, en ce moment on tourne, on fait des concerts avec les Skippies, on voie vachement de groupes, les Welcome, Condense, Prohibition, tous ces groupes là, on tourne pas mal avec eux et on s'entend bien en général, les Drive Blind qui est un super groupe. Enfin bon, c'est des groupes jeunes, tu vois ! c'est pas non plus la même génération, c'est bien cool quoi !!
Lib : C'est un renouveau !
PY : Ouais !